Cet article propose une revue systématique et réflexive de 656 publications (1958–mars 2022) sur les migrations intra-ouest-africaines, extraites de Scopus selon la méthode PRISMA et une analyse de contenu qualitative (Mayring). Il montre une montée en puissance des travaux depuis les années 2000, avec une forte concentration géographique sur le Ghana et le Nigeria, puis le Sénégal, le Mali et le Burkina Faso. Les thématiques dominantes portent sur le travail, les relations sociales/familiales et l’ethnicité/identité; l’environnement et le changement climatique progressent récemment. Les études traitent davantage des effets que des facteurs de la migration, et privilégient les espaces urbains (effet “urban trap”). Les femmes et les jeunes restent sous-représentés; la perspective translocale est encore rare. Sur le plan épistémique, les affiliations d’auteurs sont majoritairement situées aux États-Unis et en Europe, révélant des déséquilibres postcoloniaux et appelant à décoloniser la production de savoirs et à renforcer les recherches ancrées en Afrique de l’Ouest.

Migration, Genre, Changement climatique, Environnement, Jeunesse, Femmes

L’article « Most Western African migrants remain local and travel short distances », rédigé par Irene Tafani, Ola Ali, Rafael Prieto-Curiel et Massimo Riccaboni, analyse les distances migratoires de plus de 60 000 individus dans huit pays d’Afrique de l’Ouest (Sénégal, Guinée, Gambie, Mali, Burkina Faso, Niger, Nigeria et Tchad) entre 2021 et 2023. À partir des données de l’OIM et d’algorithmes de type Random Forest et XGBoost, les auteurs montrent une distribution bimodale : la majorité des migrations se font à courte distance (moins de 100 km), tandis qu’une minorité parcourt plus de 3 000 km. Les principaux déterminants sont le statut professionnel, la nationalité et les motifs de départ. Les migrations dues aux conflits sont plus longues et imprévisibles. Les auteurs appellent à des politiques qui reconnaissent la prépondérance des mobilités locales et l’instabilité des déplacements forcés dans la région.

Migration, Conflit, Pauvreté, Insertion socio-économique

Cet article présente un jeu de données ouvert et hautement détaillé sur la migration temporaire au Sénégal, construit à partir des données de téléphonie mobile de l’opérateur Sonatel entre 2013 et 2015. Les auteurs y mesurent les flux et stocks migratoires sur 151 localités pour chaque demi-mois, en se concentrant sur les déplacements de 20 à 180 jours. Ce travail pallie les limites des enquêtes traditionnelles, souvent incapables de saisir ces mouvements de courte durée. Un algorithme novateur identifie les événements de migration à partir des traces numériques, tout en distinguant mobilité quotidienne, temporaire et permanente. Le jeu de données, validé méthodologiquement, offre aux chercheurs et décideurs un outil inédit pour analyser la mobilité interne, la résilience face aux chocs économiques ou climatiques et la planification territoriale.

Migration, Conflit, Éducation, Élection, Menace, Urbanisation, Sciences sociales, Recherche, Production de connaissances, Information

L’article « Le retour des afro-descendants en Afrique : un pont entre histoire et développement aujourd’hui » examine les récents mouvements juridiques et symboliques visant à encourager le retour des Afro‐descendants vers l’Afrique, comme levier de mémoire, d’identité et de développement. L’exemple du Bénin est central : la loi promulguée en septembre 2024 permet aux personnes majeures prouvant leur ascendance africaine subsaharienne de demander la nationalité béninoise via un document généalogique ou test ADN, pour un coût de 100 USD. Le Ghana est aussi cité avec son initiative « Year of Return » (2019) et ses politiques relatives aux droits de séjour et de citoyenneté pour la diaspora. L’article souligne aussi les tensions que ces retours peuvent susciter : élévation des prix, disparités économiques, conflits fonciers avec les populations locales, instrumentalisation mémorielle. Il propose que des politiques davantage réfléchies — mêlant reconnaissance historique, diplomatie culturelle, opportunités économiques — puissent faire de ces retours un véritable pont entre héritage et progrès.

Gouvernance, Migration, Diaspora, Panafricanisme, Nationalité

L’article dresse un portrait contrasté de la jeunesse sénégalaise (18–35 ans) : plus instruite que les générations précédentes (55 % ont atteint le secondaire ou un niveau post-secondaire, contre 21-36 %) mais plus exposée au chômage (41 % en recherche active d’emploi, contre 22-36 %) . Les obstacles majeurs citées sont : le manque de formation adéquate (35 %), le refus d’occuper certains emplois (24 %), et la discordance entre les compétences académiques et les exigences du marché (16 %) . Malgré tout, 74 % des jeunes souhaitent créer leur propre entreprise, 17 % veulent intégrer le secteur public. Leurs priorités pour l’action publique : hausse du coût de la vie, santé, chômage, insécurité, eau . En dépit de la situation, 71 % estiment que le pays va dans la bonne direction, et 60 % ont envisagé d’émigrer, pour des raisons économiques

Gouvernance, Migration, Éducation, Jeunesse, Santé, Emploi, Insécurité, Politique publique

Cette note, produite en juin 2024 par le Mixed Migration Centre et relayée par WATHI, analyse les réalités et besoins éducatifs des enfants et jeunes migrants dans quatre capitales d’Afrique de l’Ouest et du Nord : Bamako, Conakry, Niamey et Tunis, en s’appuyant sur des enquêtes menées entre juin 2022 et septembre 2023 auprès de jeunes migrants âgés de 18 à 24 ans et de personnes accompagnant des enfants . Elle met en lumière l’accès limité à l’éducation : plus de la moitié des enfants ne bénéficient d’aucune scolarisation (57 %), et seulement 17 % suivent l’école primaire ou secondaire. L’éducation est l’un des besoins prioritaires identifiés, dépassant ceux liés à l’alimentation (20 %) ou aux soins de santé (18 %). Les obstacles majeurs comprennent le manque de ressources financières (41 %). Les situations varient selon les villes : à Conakry, la moitié des accompagnants soulignent le besoin éducatif, un tiers à Niamey, tandis que Tunis se distingue par un recours plus élevé à la garde informelle (32 %).

Migration, Éducation, Jeunesse, Sécurité humaine

Le Policy Brief analyse la situation du G5 Sahel (Burkina Faso, Tchad, Mali, Mauritanie, Niger), confronté à une « polycrise » mêlant fragilité institutionnelle, conflits armés et impacts du changement climatique. Bien que la région n’émette qu’1 % des gaz à effet de serre mondiaux, elle subit une hausse des températures plus rapide que la moyenne, aggravant la pauvreté, l’insécurité alimentaire et les tensions autour des ressources. La croissance démographique et l’urbanisation accentuent les pressions sociales. Les conflits liés à l’accès aux terres et à l’eau, combinés à la faiblesse des États, favorisent l’instabilité et les déplacements massifs. L’auteure souligne que les réponses doivent être coordonnées, durables et inclusives : renforcer la résilience locale, intégrer les communautés et recourir à des financements climatiques adaptés. L’avenir du Sahel dépendra de la capacité des acteurs à conjuguer développement, paix et adaptation climatique

Migration, Changement climatique, Paix, Conflit, Crise, Insécurité, Démographie, Inclusion

L’article « Assessing the Impact of Climate Extreme Events and Conflicts on Internal Displacement in Burkina Faso », publié en janvier 2025 dans l’International Journal of Disaster Risk Reduction, analyse la relation dynamique entre les événements climatiques extrêmes (inondations, tempêtes, sécheresses), les conflits (violents et non violents, manifestations) et les déplacements internes au Burkina Faso entre 2018 et 2022 Les résultats montrent qu’à court terme, les conflits violents, les manifestations et les tempêtes entraînent une hausse des déplacements internes. À long terme, les conflits violents et les tempêtes restent significativement liés aux déplacements, tandis que les inondations n’ont pas d’effet notable et que les manifestations perdent leur impact initial . L’étude suggère la nécessité de politiques efficaces en matière de gestion des conflits et d’adaptation au changement climatique pour atténuer les déplacements forcés.

Migration, Changement climatique, Sécurité, Conflit

L’article, signé par Gado Alzouma, analyse la « guerre mondiale des talents » et la place croissante de l’Afrique dans cette dynamique. Face au vieillissement et à la baisse de natalité dans les pays industrialisés, ces derniers intensifient leurs politiques pour attirer des travailleurs étrangers hautement qualifiés. L’Afrique, avec un âge médian de 19,7 ans et une croissance démographique rapide, devient un vivier stratégique. L’auteur illustre cette ruée avec des réformes migratoires en Allemagne, France, Royaume-Uni, Canada, Japon, etc., visant à faciliter l’installation des talents africains. Si cette tendance offre des opportunités, elle aggrave aussi la fuite des cerveaux, affaiblissant la compétitivité, la recherche et l’innovation sur le continent. L’article conclut que les pays africains doivent créer des économies fortes et offrir des emplois attractifs pour retenir leurs élites, sous peine de continuer à nourrir le développement d’autres régions.

Migration, Jeunesse, Emploi